Monsieur Tayyip Erdogan, prévisionniste en politique intérieure européenne, nous avertit par la voix de son très obéissant ministre des Affaires étrangères Mevlüt Cavusoglu : « Les guerres de religion vont bientôt commencer en Europe ».
Nous voilà prévenus, pour le cas où le nombre incroyable de ponts récemment construits par le même Erdogan et qui enjambent le Bosphore et sont baptisés du nom des envahisseurs ottomans les plus sanglants (Yavuz sultan Selim, Fatih Sultan Mehmet, etc) ne nous aurait pas mis la puce à l’oreille.
Il faudra que quelqu’un se dévoue pour expliquer à Monsieur Erdogan que l’Europe n’a pas attendu les conquêtes arabo-musulmanes pour découvrir les guerres de religions.
Dès les premiers mouvements humanistes, de Réforme en Contre-Réforme, de Nuit de la Saint-Barthélemy en Affaire Calas, l’Europe connut son lot de guerres de religions. Et lesdites « guerres de religions » étaient toutes intra chrétiennes.
Car « guerres de religions », c’est un terme qui recouvre très précisément les guerres liés aux schismes de la chrétienté. Ce n’est pas sous cette appellation que l’on présente les pogroms contre les Juifs ou les guerres indiennes.
Bien sûr, au Moyen-Age, les Bédouins avaient déjà traversé le golfe persique et ravageaient consciencieusement l’Afrique et l’Asie, détruisant les empires perse et byzantin et lorgnant sur l’Europe en la dévastant parfois. Bien sûr, ils rançonnaient déjà les commerçants, intellectuels et pèlerins qui faisaient le lien entre les diverses abbayes de Jérusalem et le reste du monde latin. Bien sûr, bien sûr,…. Mais jamais ces exactions n’ont été qualifiées de « guerres de religion », et pour cause !
Mais alors, de quoi nous prévient donc Erdogan ? Que le Royaume-Uni va à nouveaux raser les toits des églises papistes ? Que Voltaire devra à nouveaux prendre la plume contre le Parlement de Toulouse ?
Nullement. Il s’agit purement et simplement d’un ultimatum. Il n’est pas rédigé selon les termes du droit international, certes, mais n’oublions pas que les théocraties sont régies par le droit d’un dieu qui n’a que faire du droit des hommes. C’est donc selon la méthode habituelle, intimidations, menaces et chantage, que Monsieur Erdogan pose son ultimatum en vue d’une guerre qui est exclusivement territoriale, politique et économique. Et nullement « de religion ».
Le problème, c’est que nous sommes de moins en moins nombreux à trembler. Sincèrement, vous avez peur, vous ?